L'altération du rythme veille-sommeil occasionné par des cadences irrégulières dérégulerait les gènes impliqués dans le développement de tumeurs du sein.
Les infirmières et hôtesses de l'air travaillant la nuit seraient les professions les plus concernées par ce risque, avance l'OMS.
L'exercice de la profession d'infirmière ou d'hôtesse de l'air la nuit favorise-il le cancer ? Pour le Centre international de recherche sur le cancer, agence cancer de l'Organisation mondiale de la santé, le travail posté de nuit, communément appelé le "3-8", qui concerne environ 20% des travailleurs des pays développés, est classé comme "probablement cancérogène". Le travail posté de nuit, sur une longue période, augmenterait le risque de cancer du sein chez les infirmières et les hôtesses de l'air, comparé à celui observé chez celles qui travaillent de jour : "cependant cette augmentation est inférieure à un doublement du risque, c'est donc un risque réel mais que les épidémiologistes qualifient de modeste", commente Vincent Cogliano, épidémiologiste du CIRC.
Les études chez ces femmes sont cohérentes avec les études sur les animaux, qui démontrent que la lumière constante ou tamisée la nuit ou des décalages horaires chroniques comme le Jet lag, peuvent favoriser la survenue de tumeurs. Cette alternance irrégulières de période travail jour-nuit perturbe l'horloge biologique et se retrouve dans la même catégorie que d'autres cancérogènes "probables", comme les émanations des moteurs diesel, les rayons ultra-violets, ou le plomb des peintures anciennes, explique Vincent Cogliano.
Manque de données pour les hommes
D'après les experts, le travail de nuit pourrait ainsi être dangereux, du fait de son action sur les rythmes qui règlent notre organisme sur l'alternance jour/nuit. La lumière interrompt la production d'une hormone, la mélatonine, normalement fabriquée par le corps la nuit. Cette suppression de la mélatonine favoriserait le développement des tumeurs et l'altération du rythme veille-sommeil pourrait déréguler des gènes impliqués dans le développement de tumeurs. On sait déjà que chez les humains, la privation de sommeil et la suppression de la mélatonine qui s'ensuit conduit à une baisse des défenses immunitaires.
Cependant, relève le Dr Cogliano, des biais d'interprétation ne peuvent être totalement écartés, comme par exemple l'influence des rayons cosmiques chez le personnel navigant de l'aviation. Il ajoute que l'étude manque également de données concernant le travail masculin de nuit, par exemple chez les chauffeurs de taxis ou les routiers. En outre, certaines observations chez les pilotes de ligne, comme l'augmentation du cancer de la prostate, pourraient être liées à une meilleure surveillance de leur santé. C'est pourquoi des études complémentaires sont nécessaires pour examiner ce risque potentiel dans d'autres professions et pour d'autres cancers et notamment chez les hommes, résume-t-on au CIRC.